L’idéal

Parfois, les jours sont tellement sombres et les nouvelles tellement mauvaises, que je n’ose même pas les écrire, car mettre des mots les rendraient visibles autant que concrets, là où juste l’idée est déjà terrifiante.
Décrire la noirceur du monde et les abysses dans lesquelles l’humanité sombre provoque une adrénaline et un désespoir que je n’arrive pas à gérer. Je dois alors adopter un fatalisme exacerbé, comme un faux-moi pour me leurrer moi-même, et me protéger de ma propre panique.
Cependant, si on en croit la physique quantique, qui dit que tout est vibration, même les idées, alors la pensée a ceci de merveilleux, bien que piégeux, qu’elle attire à nous ce à quoi on pense le plus. Ruminer à propos du réchauffement climatique et des conflits actuels ne ferait donc que nourrir ce nuage de terreur et de haine, là ou il serait plus malin de concentrer son énergie et sa pensée sur ce que nous voulons, et pas ce que nous craignons. Ainsi, on augmenterait nos chances de voir un jour la lumière. La loi de l’attraction à grande échelle quoi.
C’est assez audacieux de ma part de vous dire ça, compte tenu que je suis peut-être la docteure ès rumination en ce bas monde. Mais ce soir, je voudrais m’essayer à autre chose : inverser le cours de l’eau pour écrire l’amour dans sa beauté et non l’enfer décortiqué dans lequel je me complais la plupart du temps.
On se moque beaucoup des aspirantes Miss, lorsqu’elles arrivent sur scène en jurant souhaiter la paix dans le monde. C’est naïf, utopique et complètement surréaliste : celui qui regarde n’a pas besoin d’un diplôme en sociologie pour savoir que l’homme a besoin de la guerre parce qu’il est vaniteux, en recherche constante d’un pouvoir assez grand pour masquer ses insécurités d’être humain, et qu’à cause de milliers d’années d’un fonctionnement archaïque, il ne sait plus faire autrement.
Personne ne peut arriver au pouvoir sur la simple base d’être un homme bon. Les manipulations, les jeux politiques et la corruption sont au fondement de ce qu’est aujourd’hui le pouvoir, et il serait idiot de se leurrer. Et pourtant, ce soir, si je devais visualiser ce que je souhaite de bon, je dirais sans aucune hésitation : la paix dans le monde.
La paix dans l’âme de chaque humain vivant, et la liberté nécessaire à l’écoute de ses propres désirs, sans frustration, sans injonction sociale, sans aucune des choses qui noircissent le cœur des gens.
Idéaliste ? Oui, mais quitte à visualiser le paradis, autant voir grand.
Que les civilisations, les sociétés vivent entre elles dans le respect des autres, sans essayer de convaincre le voisin que ses croyances ont plus de valeurs. Des sociétés qui comprennent que la hiérarchie de grande ampleur est contreproductive, et qu’il vaut mieux miser sur un système humaniste qui se soucie d’avantage du bien-être des personnes qui le composent, car une plante bien arrosée participe à un jardin verdoyant. Penser l’humain dans son individualité sans essayer de le formater, pour qu’il brille et apporte sa pierre à l’édifice de l’humanité.
Eduquer les enfants à la bienveillance, à l’altruisme, au respect, au partage et à l’empathie plutôt que d’essayer de les formater à un système de pensée unique, et ainsi s’obstiner à vouloir faire entrer des carrés dans des ronds.
Apprendre aux enfants à penser par eux-mêmes, afin de développer leur esprit critique et leur offrir l’autonomie de jugement.
Sur cette base, je me permets donc la fantaisie d’entrevoir la paix dans le monde. Je veux la préservation des écosystèmes et le respect entre les espèces. Que ce soit à l’encontre d’une plante, d’un caillou, d’une tortue ou d’un loup, chaque espèce devrait être respectée, et cela passe par le fameux « laisser vivre ». Laisser à la nature l’opportunité de vivre son cycle sans intervention de la main de l’homme, et laisser l’homme se faire face pour se comprendre et s’élever. Sans haine, sans peur, sans noirceur. Laisser à chacun l’opportunité de voir sa propre lumière, faisant ainsi de la planète une place si lumineuse qu’on pourrait la comparer à un paradis, et laisser au placard cette idée de l’enfer que nous avons cultivé tant et si bien qu’elle est devenue notre réalité.
Apprécier la vie est quelque chose de simple que nous avons rendu très compliqué.